Reportage Relance du tourisme domestique

Le rêve est encore loin…

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Hana MENASRIA Publié 06 Octobre 2021 à 10:45

© D.R
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Selon les professionnels du tourisme, si tous les moyens nécessaires étaient réellement mis en place par l’État algérien, le pays pourrait devenir l’une des destinations les plus attractives au monde.

Le tourisme interne ou domestique a longtemps été boudé par les Algériens, vu l’absence d’infrastructures de divertissement ou culturelles, le prix exorbitant des billets d’avion et d’hôtels, ainsi que l’absence d’une réelle “volonté politique” pour la relance du secteur touristique en Algérie. Ces points noirs qui affectent depuis des décennies ce secteur, ont poussé les Algériens à décoller vers d’autres cieux, notamment en Tunisie, en Turquie ou encore en Espagne. Mais, depuis la crise sanitaire que vit le monde ces deux dernières années, la donne a complètement changé. Ainsi les Algériens abandonnent l’étranger, pour partir à la découverte du territoire national.

Après l’ouverture des frontières, les touristes nationaux seront-ils prêts à passer leurs vacances dans le pays ? Sur cette interrogation, les voyagistes rencontrés à Tamanrasset dans le cadre de l’éductour organisé par l’EGTT, sont plutôt pessimistes, et ce, pour diverses raisons. D’ailleurs, ils ont fait un état des lieux du tourisme saharien en particulier et domestique en général, qui démontre que l’Algérie a encore du chemin à parcourir. Selon Djalal Baba Khelil, responsable de l’agence La Caravelle (Oran), cet éductour à Tamanrasset est réussi, car “nous n’avons pas cette culture de promouvoir la destination Algérie.

Organiser ce genre d’événement dans l’extrême Sud, n’est nullement facile”. Ce chef d’agence ayant principalement l’habitude d’organiser des voyages et circuits à l’étranger, estime que cette initiative est “intéressante”, car cela “m’a permis d’essayer le produit et de créer des partenariats en dehors du circuit du Sud pour travailler et collaborer avec les différentes agences”, a-t-il indiqué. Concernant, le package de 39 800 DA ­— billet, hôtel, circuit, bivouac —proposé par l’EGT Tamanrasset, le jeune voyagiste trouve le prix très raisonnable, tout en espérant que les autres agences “s’aligneront” sur les mêmes tarifs.

À ce propos, M. Baba Khelil a insisté sur le fait que Tamanrasset est une destination de rêve, et les Algériens ont longtemps été “privés” de cette région, car le package est de 70 000 DA. “Le client ne peut admettre de dormir à la belle étoile à ce prix-là ! Je souhaite qu’il y ait une volonté des pouvoirs publics de diminuer le prix du billet d’avion et de créer des hôtels moyenne gamme”, a-t-il martelé. Tout en poursuivant : “Ces décisions doivent être prises pour le Sud et les autres villes du pays. Il n’y a pas une véritable politique ni une réelle législation sur les tarifs”.

D’après le responsable de La Caravelle, toutes ces contraintes poussent les Algériens à aller ailleurs, et ce, sans occulter le problème de “qualité de service, absence de formation pour les serveurs, réceptionnistes, blanchisseurs…” “Il n’y a pas eu de véritable étude pour la relance de ce secteur. Il faut une volonté gouvernementale pour son essor”, a-t-il conclu. Dans le même sillage, Chamsou Felfli, de l’agence Antique Voyage et Tourisme (Annaba), insiste sur le fait que le grand potentiel de l’Algérie, réside dans le tourisme saharien. “Si l’État investit dans ce secteur, nous aurons un tourisme annuel : après la saison estivale suivra la saison hivernale, les touristes auront le choix entre la mer, la montagne et le désert”, a-t-il souligné. Au sujet de la relance du secteur touristique en cette période de crise, pour lui cela relève de “l’impossible”.

Car “pour l’élaboration d’un plan stratégique ou un plan commercial, cela demande un minimum de cinq années. Ce n’est pas un travail que l’on peut réaliser en deux-trois mois”, a-t-il regretté. À cet effet, pour remédier à cette situation, M. Felfli propose en premier lieu de commencer par “l’exonération fiscale et parafiscale pour les complexes touristiques, les agences de voyages, le transport interwilayas… Il faudrait que l’État baisse ces charges et c’est son rôle”, a-t-il appuyé. Une démarche qui poussera les établissements hôteliers à baisser leurs prix et les agences de voyages à souffler en ces temps de crise. 

Exploiter le patrimoine culturel pour l’essor du tourisme algérien 
Sous-traitant avec une agence de voyages, Ahmed Guettouche est un cadre banquier passionné de bivouac. Il considère que le tourisme est un secteur stratégique pour l’Algérie, et pour son essor “nous devons avoir une politique claire, une stratégie à long terme, et ce, à travers des objectifs bien déterminés”, a-t-il proposé. Par ailleurs, avant d’évoquer une quelconque promotion de la destination Algérie, selon M. Guettouche, l’État devrait en premier lieu développer le produit touristique. “Nous avons des ressources naturelles, culturelles et un patrimoine que nous devons valoriser, et ce, pour augmenter l’attractivité des sites en Algérie”, a-t-il dit. Et d’ajouter : “Chaque région possède ses richesses, cela nous permettra de créer des produits touristiques diversifiés et de qualité, à l’exemple du tourisme saharien à Seffar (Djanet), dans le Tassili ou encore sur le littoral.” 

Pour la réussite de ce projet, il suggère de  baisser les prix pour attirer les touristes, et obtenir ainsi des prix concurrentiels sur le marché, comme cela est le cas en Tunisie et en Turquie. Autre paramètre, “l’État doit encourager l’investissement et développer les infrastructures, comme les hôtels, les complexes, les auberges, les chalets… Si l’offre répond à la demande, il y aura de la concurrence et les prix baisseront”. Concernant la pandémie de coronavirus qui a lourdement impacté le secteur touristique, paradoxalement pour Mohamed Lamine Triki, représentant du groupe Nouba Travel, c’est une opportunité à saisir pour relancer ce secteur en Algérie. “Plus de 80% des Algériens ne connaissent pas le Sud ni son patrimoine touristique.

C’est l’occasion de les attirer dans cette région pour découvrir ses richesses”, a-t-il signalé. Mais pour la réussite de ce projet, le voyagiste partage le même sentiment que ses confrères sur l’absence d’une réelle volonté de l’État ; le manque d’infrastructures ; les tarifs excessifs… Par ailleurs, M. Triki reste confiant sur le package proposé pour le circuit à Tamanrasset et l’ouverture prochaine de plusieurs hôtels privés en Algérie, et ce, tout en relevant l’impératif de développer le tourisme culturel. À rappeler que le 12 septembre dernier, lors du Conseil des ministres, Abdelmadjid Tebboune a donné “des instructions et orientations sur les mesures d'urgence pour la relance du secteur du tourisme”.

Rapportées par l’APS, ces instructions consistent à accorder un intérêt particulier au tourisme interne en promouvant les prestations touristiques à la hauteur des attentes des familles algériennes ; en encourageant le tourisme thermal national et international ; en revoyant la politique des prix en cours,  de façon à créer une véritable compétitivité entre investisseurs ; en impliquant les représentations diplomatiques algériennes dans la promotion des produits artisanaux en réservant des espaces pour organiser des expositions permanentes… Si tous les moyens nécessaires étaient réellement mis en place par l’État algérien, pour ces professionnels du tourisme, le pays pourrait devenir l’une des destinations les plus attractives au monde.

 


H. M.

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