“Je ne vais pas me taire, jusqu’à ce que «yetnehaw gaâ !».” Cette profession de foi du journaliste activiste Omar, incarné par l’acteur Errachid Tahmi, prononcée au moment où il est jeté en prison par deux agents encagoulés, résume l’épopée du Hirak, reprise dans du court-métrage 22, projeté samedi dernier à Montréal. Parce que “je ne suis pas un traitre (et) vous avez trahi les chouhada”, réplique avec conviction le journaliste aux coups de rangers reçus au visage.
Dans son univers carcéral, le détenu d’opinion interagit avec trois voix de chouhada qui lui apparaissent dans son état comateux. Un dialogue s’enclenche. Ramdane Abane, Larbi Ben M’hidi et Hassiba Ben Bouali viennent rappeler à la victime leur sacrifice consenti lors du combat libérateur, conscients qu’ils semblaient être, du détournement de la Révolution, la leur.
Lors de cet échange, le sort subi par Boudiaf est évoqué. “Il l’ont ramené de l’exil”, raconte le journaliste à qui Ben M’hidi témoigne : “Il s’appelait Si Tayeb et il était «tayeb» (bien).” “Quand nous étions sur le champ de bataille, eux se préparaient au pouvoir”, se désole la voix de Ben M’hidi. “Oui, ils nous ont trahis”, dénonce Omar.
“Ton combat est le nôtre”, renchérit Hassiba Ben Bouali, encourageant le journaliste à écrire les vérités que l’histoire se chargera d’enregistrer. Dans ce huis clos dans une cellule glaciale, le fantôme de Abane proclame : “Nous avons dit que l’Algérie n’est ni orientale ni occidentale !” “Nous avons confiance en le peuple du 22 Février”, assure la voix de Abane, empruntée par l’acteur Amine Aïbout.
“Pourquoi et comment sommes-nous arrivés à cette situation”, éructe Omar, interrogeant le plafond de sa cellule carcérale, symbole de la liberté réprimée. Cet aller-retour entre le passé et le présent, avec une projection sur les perspectives d’avenir, met l’emphase sur la cause du Hirak, en jetant des passerelles avec le combat héroïque du peuple algérien pour l’indépendance.
Pour rappel, le projet a été conçu par le producteur Nasser Bensafia et le réalisateur Seïf Elhamoud. Il met en scène des acteurs hirakistes qui ont incarné des figures historiques : Lynda Bennabi dans le rôle de Hassiba Ben Bouali, Jamel Témiscamingue (Larbi Ben M’hidi) et Amine Aïbout (Ramdane Abane).
Les décors du film ont été conçus par l’artiste plasticien Ali Kichou. Il est à noter que la projection a été suivie d’un débat sur la chaîne communautaire Ksari WebTV auquel ont participé nombre de hirakistes et des influenceurs. Le court métrage sera projeté au grand public les 18, 19 et 20 février, avant son retrait du web.
Yahia Arkat