Un point de la situation sur “les libertés démocratiques et les droits de l’Homme en Algérie” a été présenté, hier, lors d’une conférence de presse tenue au siège de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (Laddh) de Béjaïa. Elle a été animée par les membres du Comité de défense et de sauvegarde des libertés et le collectif des avocats.
La situation est jugée “des plus préoccupantes, voire des plus inquiétantes” en raison, souligne Malek Sebaïhi du Comité de défense des libertés et président de séance, “des arrestations arbitraires, des violations des droits de l’Homme et de l’instrumentalisation de la justice au point que donner son opinion peut conduire en prison”. Hocine Boumedjane, le responsable local de la Laddh, explique que cette situation l’interpelle en tant que militant des droits de l’Homme. “Nous sommes présents sur le terrain, la situation nous interpelle”, dit-il.
Et de préciser : “Il y a 294 détenus. Il y a des interpellations quotidiennes. Et il y a des militants politiques qui sont convoqués. Le dernier en date, Hamou Boumedine du Rassemblement pour la Kabylie (RPK).” Il regrette qu’il ne reste, selon lui, “qu’une poignée de journaux et sites électroniques qui soient véritablement indépendants”. Abondant dans le même sens, l’avocat Me Sofiane Ouali affirme que la situation s’est tellement dégradée qu’elle dépasse celle que nous avons connue au temps du parti unique et même durant la décennie noire. Il affirme que “nous sommes dans l’insécurité juridique”, alors que la sécurité juridique est un principe du droit qui a pour objectif de protéger les citoyens contre les effets secondaires négatifs du droit, en particulier les incohérences ou la complexité des lois et règlements ou leurs changements trop fréquents. Il cite, par exemple, le code pénal et le code de procédures pénales, qui n’ont pas cessé d’être “touchés”.
Et de rappeler avec insistance : “Quand il n’y a pas de stabilité des lois, on entre dans l’insécurité juridique.” Occasion pour lui de relancer l’appel des praticiens du droit, les avocats en l’occurrence, aux magistrats, afin de “lutter pour l’indépendance de la justice et aboutir véritablement à une véritable séparation des pouvoirs”. À leur adresse, il prend l’exemple du “mandat de dépôt, qui est une exception”, mais déplore que “cette exception (soit) devenue la règle et la règle une exception”.
Pour Me Allaoua Benabdeslam, “le système judiciaire algérien est malade”, il promulgue, selon lui, des “lois contraires à la justice”. Mais en évoquant la corporation à laquelle il appartient, il n’a pas omis de déplorer l’absence de solidarité à l’égard de tous les détenus : “Nous ne devons pas faire de distinction entre les détenus. Nous défendons tous les détenus d’opinion, qu’ils soient du Hirak, du MAK ou de Rachad.” Me Sonia Mokrane a avoué que les praticiens du droit ont les mains liées. Plus encore, “en ce moment, la défense a le mauvais rôle”. Ce qui témoigne du sentiment d’impuissance qui a gagné cette corporation où ils ne sont que 10 à 15% des avocats qui demeurent mobilisés pour la défense des détenus. “Et malheureusement dans trois ou quatre wilayas seulement, à leur tête Béjaïa et Tizi Ouzou”, regrette Me Benabdeslam Allaoua.
M. OUYOUGOUTE