L’Actualité Élue maire d’une commune pauvre en moyens, mais riche en volonté

Zouina Mazouz au sommet de Beni Maouche

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Kamal OUHNIA Publié 28 Décembre 2021 à 10:47

© D.R
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De serveuse dans un restaurant à la tête d’une commune. Le parcours de Zouina Mazouz illustre de la pugnacité d’une femme qui force le destin. Maire de Beni Maouche, elle s’apprête à relever un nouveau challenge... 

À 42 ans, Zouina Mazouz est la première femme élue présidente d’APC de l’histoire de Beni Maouche, une commune reculée et montagneuse qui surplombe le versant sud de la wilaya de Béjaïa. Diplômée d'études universitaires appliquées en chimie industrielle, sortie de l’université Abderrahmane-Mira de Béjaïa, celle qui est devenue première magistrate de la commune a connu un parcours professionnel difficile qui pouvait mener à tout, sauf à devenir maire : serveuse dans un restaurant, puis vendeuse dans un magasin familial avant de décrocher, en décembre 2010, son premier contrat de travail dans le cadre du dispositif de préemploi appelé programme d’insertion des diplômés (PID) initié par la Direction de l’action sociale et de la solidarité (DASS) de la wilaya de Béjaïa. 

Ainsi, elle est recrutée au bureau d’hygiène communal de sa commune natale, en tant que contrôleuse de qualité. Après avoir été titularisée dans son emploi en 2013, à la faveur d’un concours de la Fonction publique, elle se voit promue contrôleuse principale d’hygiène, salubrité publique et environnement. Poste qu’elle occupera jusqu’au 18 décembre dernier, jour de son intronisation à la présidence de l’Assemblée populaire communale d’Ath Maouche. “Après avoir suivi une formation dans un laboratoire spécialisé, j’étais en charge des analyses bactériologiques et du contrôle sanitaire des eaux au niveau de notre commune”, nous a-t-elle confié. Sa sensibilité l’a aussi amenée à s’impliquer dans le mouvement associatif, passage obligé avant d’embrasser une carrière politique. C’est tout naturellement que Zouina Mazouz s’est retrouvée membre de l’association locale des figuiculteurs, tant sa région est connue pour être un haut lieu de production de la figue. 

Puis elle saute le pas et prend sa carte de militante à la section locale du FFS, en octobre 2012. Un mois plus tard, elle est élue, sous les couleurs de son parti, à l’APC. C’est pour elle une première expérience politique en tant que membre du conseil municipal de Beni Maouche. Ce qui lui ouvre la porte de l’Assemblée populaire de la wilaya de Béjaïa, le mandat suivant. Une ascension fulgurante dans un monde où il est difficile, pour une femme, de se faire une place. Tenace et forgée par les batailles de la vie, Zouina Mazouz doit cette ascension à la force de ses convictions. Au sein de l’APW, elle a siégé à la commission de l’urbanisme et de la construction, puis dans celle de la santé et de l’environnement. En parallèle de sa charge d’élue, Mme Mazouz assure la responsabilité de la section FFS de sa commune depuis 2019. Un CV suffisamment étoffé pour revoir ses ambitions à la hausse. 

À l’annonce du scrutin local du 27 novembre, elle est déjà prête à relever le défi et postule pour le siège de maire. En dépit du contexte difficile dans lequel été lancée la campagne électorale et l’hostilité rencontrée par les candidats, Zouina Mazouz et ses camarades n’ont pas à livrer bataille. En effet, malgré toutes ces difficultés, sa liste de candidature a pu collecter en un temps record plus de 400 formulaires de signatures, alors que le nombre de parrainages exigés était de 300. “Une bonne partie de la population locale a exigé, dès le départ, que je sois la candidate favorite au poste de premier magistrat de la commune”, nous a-t-elle fait savoir. 

En obtenant la majorité des suffrages exprimés, la liste présentée par son parti FFS s’est adjugé 8 sièges sur les 15 que compte l’APC de Beni Maouche. Tandis que la seule liste concurrente, dénommée Assirem (Espoir) et menée par des candidats indépendants, a remporté les 7 sièges restants. Bien que le FFS compte deux femmes parmi ses 8 élus, le choix du prétendant au trône s’est porté sur Zouina Mazouz, la coqueluche des militants et sympathisants du parti. En plus de l’engouement populaire qu’elle a suscité dans sa commune, cette dernière jouit d’un soutien sans faille de sa famille. “À vrai dire, ce sont mes parents qui m’ont encouragée à aller de l’avant dans ma carrière politique. C’est tout mon entourage familial qui me soutient et qui m’a incitée à m’engager dans cette compétition électorale”, s’enorgueillit-elle. Son élection a fait la fierté de ces concitoyens mais aussi de ceux qui ont fait le choix de ne pas voter lors du scrutin du 27 novembre dernier et qui semblent le “regretter”. “Des citoyens, venus me féliciter après mon élection, ont tenu à exprimer leur regret de n’avoir pas voté le 27 novembre dernier. Autant de gestes de soutien et de marques de sympathie qui m’obligent à ne lésiner sur aucun effort pour servir mes concitoyens et ma région. J’espère que je serai à la hauteur des aspirations de ceux qui ont placé leur confiance en ma personne et mon parti. Il est donc de mon devoir de travailler d’arrache-pied avec tous les membres de notre Assemblée, afin d’honorer les engagements pris par notre liste.”   

Petits moyens, grands défis 
Composée de 28 villages et hameaux répartis sur une superficie globale de 94,86 km², la municipalité de Beni Maouche, qui compte environ 15 000 âmes, est classée dans la catégorie des communes déficitaires. Perchée sur le mont Achetoug, situé à la lisière des wilayas de Béjaïa et de Sétif, le territoire d’Ath Maouche est constitué d’une zone montagneuse au relief accidenté. D’où sa vocation agricole, dont l’arboriculture fruitière demeure l’activité principale de ses habitants. En fait, c’est la filière figuicole qui a fait la réputation de la tribu des Ath Maouche. 

Des potentialités agricoles non moins négligeables qu’il faudra exploiter, dont plusieurs filières relevant de l’agriculture de montagne sont à valoriser. En tout cas, c’est le seul créneau pourvoyeur de revenus et d’emplois qui reste. Car, dans le plan de développement présenté par le nouvel exécutif communal, on prévoit la promotion à moyen et long termes du tourisme de montagne. Un secteur qui pourra engranger, selon Zouina Mazouz, une plus-value supplémentaire pour sa commune, à travers, notamment, la valorisation des produits du terroir qui sont légion. Parmi les priorités de la population locale, la mairesse cite notamment le développement du secteur agricole, à travers l’ouverture et l’aménagement des pistes agricoles, la réalisation des forages (puits), des retenues collinaires, des captages de sources, la mise en place des systèmes d’irrigation, notamment pour la filière maraîchère, la création de pépinières...

Outre l’arboriculture fruitière, l’apiculture, elle compte développer aussi, durant le prochain quinquennat, d’autres filières potentiellement rentables, telles que la figue de Barbarie et la culture maraîchère. “Il y a un projet qui me tient vraiment à cœur depuis des années. Il s’agit de la création d’un marché hebdomadaire dédié à la promotion de nos produits du terroir. Ce sera une aubaine pour nos paysans qui voudraient écouler leurs marchandises.” À cela s’ajouteront des unités de transformation et de conditionnement des produits dérivés de la figue (confitures, mélasse de figue...). Pour l’édile communal d’Ath Maouche, le principal objectif de son équipe est d’endiguer ce phénomène d’exode rural qui a pris ces dernières années des proportions alarmantes. “Pour preuve, nous avons sept écoles primaires qui sont déjà fermées à cause d’un manque d’élèves. Ce qui contraint les élèves des villages d’Ighzer Oubellout et de Tala Tinzer à parcourir quotidiennement pas moins de 18 kilomètres pour rejoindre leur école à Aït Adjissa”, a-t-elle soutenu.

Et afin, justement, de pouvoir maintenir ces populations des zones rurales dans leurs villages respectifs, Zouina Mazouz estime que les pouvoirs publics doivent doter sa commune d’un quota plus important de logements ruraux, dès lors que la formule de l'habitat rural financée par le Fonds national du logement (Fonal) reste la seule solution pour endiguer la crise du logement dans la région. 

 

 

Par : KAMAL OUHNIA

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