C’est un ouvrage riche et fouillé que vient de publier le célébre avocat Ali Haroun aux éditions Casbah. Une plongée profonde dans l’histoire de la Fédération de France du FLN dont il a été l’un des présidents.
Intitulé Le second front. Écrits et documents de la Fédération de France du FLN 1954-1962, ce livre est une mine d’or et un apport considérable pour chercheurs, historiens et universitaires. Ce livre de 665 pages propose des documents inédits (274 au total), écrits par la Fédération de France du FLN et les membres du comité fédéral durant la guerre de Libération.
Cette initiative de déterrer ces textes est de nature à contribuer à “une écriture, aussi proche que possible, de la vérité historique. L’archive est honnête en soi et le texte écrit, relate des faits et des évènements réels de l’époque”.
D’ailleurs, les écrits présentés sont “bruts” et n’ont pas été retouchés par l’auteur, est-il précisé dans l’avant-propos.
Après avoir rassemblé ces textes “préservés” par des “amis” allemands, belges, français et suisses qui les ont mis, durant des décennies, “à l’abri des recherches policières”, Ali Haroun a estimé qu’il n’est pas “inutile de commenter séparément les documents” par ses observations, analyses et critiques développées dans le livre. Mais il “n’entend polémiquer avec personne ni dénigrer quiconque (…).
Il convenait simplement de situer chacun à la place qu’il a réellement occupée, dans le rôle qu’il a réellement exercé”. Concernant le contenu de ces archives qui éclairent sur la lutte de l’émigration algérienne en France durant la guerre de Libération, elles sont réparties en trois phases : 1954-1959, 1960 et 1961-1962.
Parmi ces documents, on retrouve le bulletin intérieur “Le front de libération nationale doit organiser l’émigration algérienne contre vents et marées” (daté de mars 1955), dont les points prédominants portent sur : l’organisation, l’éducation morale, le militantisme éclairé et diverses directives.
À ce propos, Ali Haroun a expliqué, dans la partie analyses et commentaires, que ce bulletin était dans l’optique d’organiser la masse, car c’est “l’œuvre primordiale de tout mouvement révolutionnaire”. Pour l’ancien ministre, l’objet essentiel du FLN naissant est de faire d’une foule d’individus désorganisés, “donc incapable d’action coordonnée, un groupement mobilisé autour d’un but commun”.
Outre les archives visant les colons, cet ouvrage comporte trois documents numéros 270 (daté du 2 juillet 1962), 272 (daté du 31 août 1962) et 273 (daté du 3 septembre 1962), qui annoncent “la crise du FLN de juin 1962 à Tripoli, marquant la fin de mission du FLN authentique”.
À ce propos, l’éditeur a expliqué dans une note au lecteur que “Le second front. Écrits et documents de la Fédération de France du FLN 1954-1962” a été finalisé en 2019, et les préparations de tirage étaient en cours “lorsqu’intervient le Hirak”.
À cet effet, le contexte politique a “poussé l’éditeur et l’auteur à surseoir au tirage, vu que le commentaire pouvait donner lieu à des incompréhensions entraînant de la part du pouvoir réel du moment, des mesures inappropriées”, est-il mentionné.
Dans l’analyse, l’auteur indique que pour la première fois, un appel est lancé par la Fédération non pas à l’encontre du colonialisme, mais à quelques “chefs militaires de l’ALN stationnés aux frontières”. Et ces responsables se sont “rebellés” non par “opposition politique au GPRA” mais pour “s’emparer du pouvoir et s’imposer au peuple”...
Une situation qui perdure depuis 59 ans !
H. M.
“Le second front. Écrits et documents de la Fédération
de France du FLN 1954-1962”, d’Ali Haroun, Editions Casbah, collection mémoire, 665 pages, 2021, 1500 DA.
